BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS
DIRECTION GÉNÉRALE DES IMPÔTS
3 D-3-02
N° 123 du 15 JUILLET 2002
TVA. EXCLUSIONS DU DROIT A DEDUCTION. DEPENSES DE LOGEMENT, DE RESTAURANT, DE RECEPTION
ET DE SPECTACLES. PORTEE DE l’ARRET DU CONSEIL D’ETAT « SYNDICAT DE L’INDUSTRIE DES TECHNOLOGIES
DE L’INFORMATION » DU 27 MAI 2002.
(C.G.I., article 271 et annexe II, articles 230 et 236)
NOR : BUD F 02 30014 J
Bureau D1
PRESENTATION
Par un arrêt du 27 mai 2002 « Syndicat de l’industrie des technologies de l’information », le Conseil d’Etat a partiellement annulé pour illégalité l’instruction administrative du 13 novembre 2000 (BOI 3 D-2-00) qui commentait les conséquences d’une décision rendue le 19 septembre 2000 par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE). La CJCE avait jugé invalide une décision du Conseil des communautés européennes du 28 juillet 1989 qui autorisait la France à exclure du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) certaines dépenses d'hébergement, de restauration, de réception et de spectacles.
L’instruction du 13 novembre 2000 est annulée en tant qu’elle inclut au nombre des dépenses de restaurant, de réception et de spectacles qui n’ouvrent pas droit à déduction de la TVA celles que supportent les entreprises du fait de la participation de leurs dirigeants ou salariés à des repas, réceptions ou divertissements organisés dans le seul intérêt de leur activité.
En raison de l’invalidité de la décision du Conseil du 28 juillet 1989 déjà citée, la mesure d’exclusion prévue à l’article 236 de l’annexe II au Code général des impôts n’est donc plus applicable :
- aux dépenses d’hébergement, de restaurant, de réception et de spectacles supportées par les redevables au bénéfice de tiers à leur entreprise (BOI 3 D-2-00 déjà cité) ;
- et, à la suite de l’arrêt rendu le 27 mai 2002 par le Conseil d’Etat, aux dépenses de restaurant, de réception et de spectacles que supportent les entreprises du fait de la participation de leurs dirigeants ou salariés à des repas, réceptions ou divertissements organisés dans le seul intérêt de leur activité.
Le Conseil d’Etat confirme que demeurent dans tous les cas exclues du droit à déduction les dépenses d’hébergement ou de logement que supportent les entreprises au bénéfice de leurs dirigeants et salariés.
A compter du 1ermai 2002, la TVA grevant les dépenses de restaurant, de réception et de spectacles que supportent les entreprises au bénéfice de leurs dirigeants et salariés ouvrent donc droit à déduction dans les conditions habituelles, dès lors que ces dépenses sont nécessaires à l’exploitation (CGI, art. 271 et 230 de son annexe II).
Les entreprises concernées peuvent récupérer, selon les modalités exposées dans la présente instruction, la TVA ayant grevé les dépenses de cette nature qu’elles ont supportées à compter du 1er janvier 1996.
I. Introduction
L’article 236 de l’annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction issue de l’article 4 du décret n° 89-885 du 14 décembre 1989 pris notamment sur le fondement d’une décision 89/487/CEE du Conseil des Communautés européennes du 28 juillet 1989, exclut du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) les dépenses de logement, de restaurant, de réception et de spectacles quel qu’en soit le bénéficiaire.
Par un arrêt « AMPAFRANCE SA/SANOFI SYNTHELABO » du 19 septembre 2000, la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a jugé invalide la décision précitée du Conseil.
L’instruction du 13 novembre 2000 (publiée au BOI 3 D-2-00 du 17 novembre 2000) commentant la portée de cet arrêt, précise que la mesure d’exclusion, prévue à l’article 236 de l’annexe II au CGI, n’est plus applicable à celles des dépenses de logement, de restauration, de réception et de spectacles supportées par les redevables au bénéfice de tiers à leur entreprise.
Par un arrêt n° 229 133 du 27 mai 2002 le Conseil d’Etat a annulé cette instruction, en tant qu’elle inclut au nombre des dépenses de restaurant, de réception et de spectacles qui n’ouvrent pas droit à déduction de la TVA celles que supportent les entreprises du fait de la participation de leurs dirigeants ou salariés à des repas, réceptions ou divertissements organisés dans le seul intérêt de leur activité.
La Haute juridiction confirme en revanche que demeurent exclues du droit à déduction toutes les dépenses d’hébergement et de logement que les entreprises supportent au bénéfice de leurs dirigeants et salariés.
S’agissant des dépenses supportées au bénéfice de tiers, il convient de se reporter à l’instruction 3 D-2-00 déjà citée qui conserve, pour ces dépenses, toute sa valeur à l’exception toutefois des précisions concernant les dépenses de restaurant, de réception et de spectacles pour lesquelles était prévue une obligation de ventilation parmi ces dépenses entre celles qui sont supportées au bénéfice de tiers et celles supportées au bénéfice des salariés et dirigeants.
Cette obligation de ventilation est en effet sans objet puisque toutes les dépenses de restaurant, de réception et de spectacles ouvrent désormais droit à déduction dans les conditions décrites aux II à IV ci‑dessous.
La présente instruction a pour objet de commenter l’arrêt du Conseil d’Etat.
II. Portée de l’arrêt du Conseil d’Etat
La portée de la dérogation accordée par le Conseil en 1989 était limitée aux dépenses qui n’étaient pas déjà exclues du droit à déduction de la TVA avant l’entrée en vigueur de la sixième directive.
Les dépenses frappées d’exclusion à cette date demeurent, en effet, couvertes par les dispositions du paragraphe 6 de l’article 17 de cette directive qui autorisent les Etats membres à maintenir toutes les mesures d’exclusion prévues par leur législation nationale avant son entrée en vigueur (« clause de gel »).
En raison de l’invalidité de cette dérogation et à la suite de l’arrêt rendu le 27 mai 2002 par le Conseil d’Etat, il convient de distinguer désormais, parmi les exclusions prévues à l’article 236 de l’annexe II au CGI :
· Celles des dépenses dont l’exclusion du droit à déduction demeure couverte par la «clause de gel »
Il s’agit des dépenses d’hébergement et de logement qui sont supportées par les entreprises au bénéfice de leurs dirigeants et salariés. Leur exclusion du droit à déduction, prévue par le décret n° 67‑604 du 27 juillet 1967 (articles 7 et 11), n’est pas affectée par l’invalidité de la décision du Conseil du 28 juillet 1989 déjà citée.
· Celles des dépenses dont l’exclusion n’est plus couverte par la « clause de gel » et ouvrent, de ce fait, droit à déduction. Ces dépenses sont :
- d’une part, les dépenses de logement, de restaurant, de réception et de spectacles que les redevables de la TVA supportent au bénéfice de tiers à leur entreprise. Les conditions d’exercice du droit à déduction de la taxe grevant ces dépenses sont décrites dans l’instruction 3 D-2-00 du 13 novembre 2000 déjà citée à laquelle il convient de se reporter sous réserve des précisions apportées au I ci‑dessus s’agissant de la ventilation des dépenses de restaurant, de réception et de spectacles, devenue sans portée ;
- et, d’autre part, les dépenses de restaurant, de réception et de spectacles que supportent les entreprises du fait de la participation de leurs dirigeants et salariés à des repas, réceptions ou divertissements organisés dans le seul intérêt de leur activité.
La déductibilité de ces dépenses s’apprécie désormais, dans les conditions de droit commun, sur le seul fondement des dispositions des articles 271 du CGI et 230 de son annexe II.
Un décret modifiera prochainement l’article 236 de l’annexe II au code général des impôts afin de mettre ses dispositions en conformité avec la sixième directive et la jurisprudence rendue, en ce domaine par la CJCE et le Conseil d’Etat.
III. Conditions d’exercice du droit à déduction de la TVA grevant les dépenses de restaurant, de réception et de spectacles engagées par les entreprises au bénéfice de leurs salariés et dirigeants à compter du 1er mai 2002
Les redevables de la TVA peuvent à compter du 1er mai 2002 porter en déduction, dans les conditions de droit commun, la taxe grevant les dépenses de restaurant, de réception et de spectacles qu’ils supportent du fait de la participation de leurs dirigeants et salariés à des repas, réceptions et divertissements.
1. La TVA qui a grevé de telles dépenses ne peut être déduite qu’à la condition que celles‑ci soient utilisées pour les besoins d’opérations ouvrant droit à déduction et que la taxe correspondante figure distinctement sur une facture d’achat (CGI, art.271-II-1).
2. La facture, ou le document en tenant lieu, doit être un original (CGI, art.286-I-3°) et comporter les mentions prévues par les dispositions des articles 289-II du Code général des impôts et 242 nonies de l’annexe II à ce code.
3. Afin de permettre aux redevables de justifier du bien-fondé d’un droit à déduction, la facture doit distinguer, le cas échéant, les prestations de restaurant, de réception et de divertissements susceptibles d’ouvrir droit à déduction de celles de logement ou d’hébergement qui demeurent exclues.
En ce qui concerne les dépenses de logement ou d’hébergement supportées concurremment au bénéfice de tiers – ouvrant droit à déduction – et au bénéfice de dirigeants et/ou de salariés – qui n’ouvrent pas droit à déduction ‑, il est admis, comme il est précisé dans l’instruction 3 D‑2‑00 du 13 novembre 2000, que le montant de la taxe déductible soit déterminé en proportion du nombre de tiers par rapport à l’ensemble des personnes ayant bénéficié des dépenses de cette nature portées sur la facture.
Afin de justifier, dans ce cas, que la taxe dont la déduction est opérée se rapporte effectivement à des dépenses de logement engagées au bénéfice de tiers, les entreprises devront porter sur les factures délivrées par les fournisseurs l’identité et la qualité des bénéficiaires.
4. Les dépenses doivent être nécessaires à l’exploitation (CGI, ann. II, art. 230).
IV. Règles applicables aux dépenses de restaurant, de réception et de spectacles engagées au profit des dirigeants et des salariés entre le 1er janvier 1996 et le 30 avril 2002
1. La décision ayant relevé la non‑conformité au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 190, 3° alinéa du Livre des procédures fiscales est l’arrêt rendu par la Cour de justice le 19 septembre 2000 dans l’affaire « AMPAFRANCE/SANOFI SYNTHELABO » déjà cité.
2. Dès lors, les redevables qui n’ont pas exercé les droits à déduction relatifs aux dépenses de restaurant, de réception et de spectacles supportées dans les conditions susdécrites au bénéfice des dirigeants ou salariés depuis le 1er janvier 1996 peuvent récupérer la taxe ayant grevé ces dépenses dans les conditions suivantes :
- par imputation sur les déclarations de TVA en ce qui concerne la taxe ayant grevé les dépenses supportées du 1er décembre 1997 au 30 avril 2002 (CGI, Ann. II, art. 224)[1].
La taxe dont la déduction est ainsi opérée est portée sur la ligne « Autre TVA à déduire » ou « Omission ou complément de déduction » ;
- par voie de réclamation contentieuse s’agissant de la taxe ayant grevé les dépenses supportées du 1er janvier 1996 au 30 novembre 1997[2].
Les modalités d’exercice de cette action en restitution, prévue à l’article L. 190, 3ème alinéa du LPF déjà cité, sont commentées par l’instruction 13 O-2-90 du 10 mai 1990 à laquelle il convient de se reporter.
3. La taxe dont l’exclusion du droit à déduction était contestée dans le cadre d’une procédure contentieuse en cours à la date du 19 septembre 2000 peut faire l’objet d’une restitution quelle que soit la date à laquelle les dépenses correspondantes ont été supportées.
4. Quelle que soit la procédure selon laquelle les redevables entendent exercer leurs droits, la taxe dont l’imputation peut être opérée ou la restitution obtenue est déterminée dans les conditions précisées ci-dessus au III.
Les redevables qui ne seraient pas en possession de factures établies dans les conditions précisées au III (facture mentionnant la TVA notamment) doivent se faire délivrer par leur fournisseur une facture rectificative comportant toutes les mentions requises.
A cet égard, il est admis que le fournisseur établisse, par année, un bordereau récapitulatif relatif aux dépenses de restaurant, de réception et de spectacles.
Ce document doit être accompagné des factures originales sur lesquelles figurera l’ensemble des mentions obligatoires exigées pour les factures rectificatives (date et références de la facture initiale, prix hors taxe, prix TTC).
Annoter : Instruction du 13 novembre 2000 publiée le 17 novembre 2000 au Bulletin Officiel des Impôts sous la référence 3-D-2-00.
DB 3 D 1531
Le Directeur de la législation fiscale
Hervé LE FLOC’H LOUBOUTIN
[1] Avant le 31 décembre des années 2002, 2003, 2004 pour les dépenses supportées respectivement du 1er décembre 1997 au 30 novembre 2000, du 1er décembre 2000 au 30 novembre 2001 et du 1er décembre 2001 au 30 avril 2002.
[2] Et, le cas échéant, de tout ou partie de la taxe ayant grevé les dépenses supportées du 1er décembre 1997 au 30 avril 2002 si elle n’a pas été imputée par application de l’article 224 de l’annexe II au code général des impôts.